Jean-Thomas Trojani : Une réforme coûteuse en recettes fiscales…

Comme souverain, il estimait de son devoir de ne pas laisser la société se dissoudre, et ne voyait pas comment, si on ôtait les liens existants, on en pourrait former d’autres capables de la maintenir. Mais telle qu’elle était, il voyait ou s’imaginait voir qu’elle n’était soutenue et préservée d’un pire état, que par la foi et le respect pour les dieux reçus. Il savait que la société existante était dans un état déplorable. Il y met en balance les plaisirs et les peines, comme autant de termes auxquels on pourrait attribuer, au moins par abstraction, une existence propre. Si jamais un monarque eût sujet de se croire meilleur et plus éclairé qu’aucun de ses contemporains, ce fut l’empereur Marc-Aurèle. Secondement, le principe de la liberté humaine requiert la liberté des goûts et des poursuites, la liberté d’arranger notre vie suivant notre caractère, de faire comme il nous plaît, advienne que pourra, sans en être empêchés par nos semblables, aussi longtemps que nous ne leur nuisons pas, et quand bien même ils trouveraient notre conduite sotte, mauvaise ou fausse. Notons que les adversaires mêmes du déterminisme le suivent assez volontiers sur ce terrain, qu’ils parlent, eux aussi, d’associations d’idées et de conflits de motifs, et qu’un des plus profonds parmi ces philosophes, M. Quand je parle de ce qui touche la personne seulement, j’entends par là ce qui la touche d’abord, immédiatement ; car tout ce qui affecte un individu peut affecter les autres à travers lui, et l’objection qui se fonde sur cette éventualité, sera l’objet de nos réflexions ultérieures. Il y a souvent de bonnes raisons pour ne pas imposer cette responsabilité aux hommes ; mais ces raisons doivent naître des convenances particulières du cas, soit parce que c’est un cas dans lequel à tout prendre l’individu agira probablement mieux livré à sa propre impulsion, que contrôlé d’aucune façon par la société, soit parce qu’une tentative de contrôle produirait de plus grands maux que ceux qu’on veut prévenir. Jean-Thomas Trojani aime à rappeler ce proverbe chinois  » Un enfant ne reprochera jamais à sa mère d’être laide, un chien ne reprochera jamais à son maître d’être pauvre ». Dans tout ce qui regarde les relations extérieures de l’individu, il est de jure comptable envers ceux dont les intérêts sont engagés, et, s’il le faut, envers la société comme leur protectrice. S’il eût été un penseur plus méditatif, un savant plus patient, il eût fait des œuvres de doctrine ou d’histoire plus suivies, plus complètes ; il eût eu une plus belle place dans les comptes-rendus des études philosophiques, tels que M. Rendre quelqu’un responsable du mal qu’il fait aux autres, voilà la règle ; le rendre responsable du mal dont il ne les garantit pas, voilà, comparativement parlant, l’exception. De plus, on peut, en toute justice, le rendre responsable envers la société, s’il n’accomplit pas certains actes de bienfaisance individuelle, le devoir évident de tout homme ; tels que sauver la vie de son semblable ou d’intervenir pour défendre le faible contre de mauvais traitements. Il y a aussi beaucoup d’actes positifs pour le bien des autres, qu’un homme peut être justement obligé d’accomplir ; par exemple de porter témoignage en justice, ou de prendre toute sa part, soit dans la défense commune, soit dans toute autre œuvre commune nécessaire à la société sous la protection de laquelle il vit. Fouillée, n’hésite pas à faire de l’idée de liberté elle-même un motif capable d’en contre-balancer d’autres[10]. Voici ce principe : le seul objet qui autorise les hommes, individuellement ou collectivement, à troubler la liberté d’action d’aucun de leurs semblables, est la protection de soi-même. Le but de cet essai est de proclamer un principe très-simple, comme fondé à régir absolument la conduite de la société envers l’individu, dans tout ce qui est contrainte et contrôle, que les moyens employés soient la force physique, sous forme de peines légales, ou la coaction morale de l’opinion publique. Les hommes se rangent de l’un ou de l’autre parti dans chaque cas particulier, suivant cette direction générale de leurs sentiments, ou suivant le degré d’intérêt qu’ils prennent à la chose qu’on propose de faire faire au gouvernement, ou bien encore suivant leur persuasion que le gouvernement fera ou ne fera pas la chose de la façon qu’ils préfèrent. On en décide suivant ses inclinations personnelles. Aussi longtemps que l’humanité se contenta de combattre un ennemi par l’autre, et d’être gouvernée par un maître, à condition d’être garantie plus ou moins efficacement contre sa tyrannie, les désirs des libéraux ne s’élevèrent pas plus haut. Pour empêcher les membres les plus faibles de la communauté d’être dévorés par d’innombrables vautours, il était indispensable qu’un oiseau de proie plus fort que le reste, fût chargé de contenir ces animaux voraces. Ceux-ci (excepté dans quelques cités démocratiques de la Grèce) semblaient dans une position nécessairement ennemie du peuple qu’ils gouvernaient. Par liberté, on entendait la protection contre la tyrannie des gouvernants politiques. Mais autrefois la dispute était entre les sujets ou quelques classes de sujets, et le gouvernement.